BERTHE MORISOT : UNE IMPRESSIONNISTE SACHANT FAIRE FORTE IMPRESSION

Berthe Morisot par Edouard Manet (1870)

Vous avez jusqu’au 22 septembre pour aller admirer au musée d’Orsay les oeuvres picturales de Berthe Morisot.
Exposés dans de nombreux sites d’art emblématiques à travers le monde, soixante-treize huiles sur toile et deux pastels, viennent s’accrocher en mémoire de l’une des seules femmes à s’être illustrée chez les impressionnistes.
Moins connue que ses amis Monet, Degas, Renoir, ou encore son beau-frère Édouard Manet, elle avait pourtant été immédiatement reconnue comme l’une des artistes les plus novatrices du cercle.

Berthe Morisot apprit à peindre auprès des copistes du Louvre en ayant pour professeur Jean-Baptiste Corot.  Durant cette époque, elle rejette le courant académique alors à la mode pour privilégier des oeuvres sensibles et lumineuses montrant des scènes de la vie quotidienne.

Un jour de 1868, Edouard Manet écrit à Henri Fantin-Latour, à propos de deux jeunes filles qui font de la peinture, ces phrases qui en disent long :« Je suis de votre avis, les demoiselles sont charmantes. C’est fâcheux qu’elles ne soient pas des hommes; cependant elles pourraient, comme femmes, servir la cause de la peinture en épousant chacune un académicien. »

Berthe Morisot avait le don de savoir s’emparer de thématiques de la vie moderne, telles que l’intimité de la vie bourgeoise, le goût de la villégiature et des jardins, l’importance de la mode, le travail domestique féminin, tout en brouillant les frontières entre intérieur/extérieur, privé/public, fini/non fini.

Berthe Morisot – Enfants à la vasque (1886)

Pour elle, la peinture a la qualité de l’instantané, du spontané. Elle s’efforce de « fixer quelque chose de ce qui passe. »

Contrairement à Renoir et Monet, elle n’avait pas besoin de vendre ses tableaux pour vivre.

Mais faut-il voir chez Berthe Morisot une féministe sachant s’affirmer au milieu d’un univers largement dominé par des hommes de talent ?

Surtout lorsqu’on retrouve dans son journal rédigé  en 1890 le sentiment qu’elle exprimait ainsi : «Je ne pense pas qu’il ait jamais été un homme qui traite une femme sur un pied d’égalité, et c’est tout ce que j’aurais demandé. Je sais que je vaux autant qu’ils sont.»

Son influence s’étendit auprès d’importants poètes et compositeurs de son époque, à l’instar de Mallarmé qui était l’un de ses plus proches amis.
Elle partageait en effet avec lui le même amour de la brièveté, des feuilles et de la musique.

Quant à Paul Valéry, son neveu par mariage, il eut la chance de vivre entouré de ses peintures.
C’est ce qui allait le conduire à souligner les similitudes entre l’effet des toiles de Morisot et celui des poèmes de Mallarmé en écrivant : »Composés de rien, ils ne multiplient que rien, un soupçon de brouillard ou de cygnes, avec un art tactile suprême, l’habileté d’un pinceau qui plume à peine la surface. Mais cette légèreté exprime tout: le moment, le lieu et la saison, son expertise et sa rapidité, un atout précieux pour saisir l’essentiel, réduire au minimum l’importance de la matière et donner ainsi l’impression la plus forte qui soit. »

En 1941, une exposition de peintures de Morisot eut lieu à Paris pour célébrer le centenaire de sa naissance.
Le catalogue contenait un bref essai de Paul Valéry qui estimait que suffisamment de temps s’était écoulé pour que l’on puisse maintenant apprécier les qualités que Berthe Morisot possédait parmi les impressionnistes et qui, de surcroît, s’inscrivent parmi les plus rares en peinture.

Il émettait le souhait qu’il ne faille pas attendre encore 80 ans pour que Berthe Morisot, figure de l’impressionnisme, soit révélée aux regards de tous. Un voeu exhaussé, puisqu’en 2012 le musée Marmottan, allait offrir une première exposition monographique de son travail.

Exposées depuis le 18 juin au musée d’Orsay, les oeuvres de Berthe Morisot invitent à une paisible promenade découverte dont le clip vidéo ne dévoile qu’en partie le caractère artistique et enchanteur.

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