Si le Chili apparaît éloigné géographiquement voire actuellement déconseillé en termes de destination, en raison d’une accélération de la propagation du Covid-19, phénomène également enregistré au Brésil et en Argentine, un événement d’une tout autre nature conduit à s’intéresser à ce pays.
Il s’agit de la nomination, le 5 mai dernier, par Sebastián Piñera, actuel président du Chili de la petite nièce du dictateur Augusto Pinochet au poste de ministre de la Condition féminine et de l’égalité des sexes.
Resté vacant depuis le 13 mars, après la démission d’Isabel Plá, accusée de passivité et de mépris durant la plus grande crise sociale du pays, ce dernier ne pouvait demeurer inoccupé.
Car depuis le début du soulèvement populaire du 18 octobre 2019, les femmes sont omniprésentes dans les cortèges et les assemblées. Le mouvement féministe constitue d’ailleurs au Chili une des principales forces sociopolitiques transversales dans laquelle se reconnaît une grande partie de la population.
En octobre 2019, le mouvement féministe populaire, Concepción et Valparaíso, avait donné lieu dans la capitale à des manifestations, plus de 2000 femmes étant venues dénoncer notamment les violences sexuelles et l’absence de reconnaissance de leurs droits.
A tel point que le mouvement féministe est parvenu à faire de l’égalité de genre une question centrale du processus constituant en cours.
Le 4 mars, le congrès chilien a voté une réforme garantissant que la convention constituante, qui devrait découler du plébiscite du 26 avril sur un changement de constitution, soit paritaire. Une première mondiale, mais aussi un pas de géant dans un pays conservateur comme le Chili, où le divorce n’a été légalisé qu’en 2004.
Malgré les nombreux obstacles qui demeurent et la profonde incertitude qui règne, le mouvement féministe chilien a d’ores et déjà réussi à placer ses revendications au cœur du débat politique.
Le 8 mars plus d’un million de personnes manifestait dans les rues de Santiago et des rassemblements avaient lieu dans plus de 45 villes à travers le pays.
Puis il y eu la spectaculaire grève générale féministe du 9 mars visant à dénoncer la non reconnaissance du droit à l’égalité, les Chiliennes arborant des foulards verts, popularisés par les féministes argentines pour le droit à l’avortement.
Bien que le Chili qui compte 18 millions d’habitants recense un total de 73 997 cas de coronavirus Sars-CoV-2, dont 761 décès, depuis l’apparition d’un premier cas le 3 mars et que le président Sebastian Piñera juge le système de santé national saturé et « très proche de ses limites », il y aura un après COVID. Et de féminisme il sera question.
Toutefois, en nommant Macarena Santelices, ministre de la Condition féminine et de l’égalité des sexes, Sebastián Piñera actuel président du Chili, n’a pas manqué de susciter une vive controverse au sein de l’opposition et de la société civile.
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Désigner à ce poste l’héritière d’une dictature militaire à l’origine de 3 200 assassinats, près de 38 000 personnes torturées et 316 femmes violées, a généré la stupéfaction. De plus, les déclarations de cette jeune femme de 42 ans en 2016, justifient les vives critiques émises par des associations féministes.
Dans un entretien au quotidien conservateur El Mercurio, l’ancienne présentatrice de journal télévisé a défendu les « bons côtés » de la dictature et d’autres contre les migrants
Mais qui est donc Macarena Santelices ?
Avant tout une journaliste qui a débuté sa carrière à la télévision en l’an 2000, et a animé de nombreuses émissions sur différentes chaînes du pays avant de se consacrer à sa candidature à la mairie d’Olmué.
Elue maire en 2012 , puis réélue aux élections de 2016 Une commune de 16.000 habitants située dans la région de Valparaiso, elle allait poursuivre ce nouveau chemin .et être élue vice-présidente de l’Association chilienne des municipalités en mars 2019. Le 13 octobre 2019, elle démissionnait de son poste de maire et devenait gouverneur régional lors des élections de 2020.
Désormais, elle est ministre de la Condition féminine et de l’égalité des sexes et ne pourra pas masquer ses ambitions.
Démonstration qu’il est parfois des héritages lourds à porter qu’il faut impérativement savoir refuser.