Alors qu’en cette période de vacances de la Toussaint, les Françaises comme de nombreuses européennes profitent de la liberté qui leur est donnée, sans avoir à s’inquiéter outre mesure des conditions relatives à la poursuite de leurs études dans l’enseignement primaire, secondaire et supérieur, tel n’est pas le cas de jeunes filles afghanes.
Bien que certains collèges et lycées aient déjà été autorisés par le nouveau gouvernement taliban à rouvrir leurs portes aux filles dans le nord, où les femmes ont longtemps joué un rôle plus important dans la société que dans le centre sud, force est de constater que des différences culturelles façonnent les politiques du nouveau gouvernement taliban dans différentes parties du pays.
Sous la pression de gouvernements étrangers et de groupes d’aide internationaux, les nouveaux responsables talibans ont beau chercher à rassurer en précisant que les choses seront différentes pour les filles et les femmes avec leur nouvelle arrivée au pouvoir, le doute subsiste chez de nombreux parents et enseignants.
Tout d’abord parce que cette autorisation est soumise à certaines conditions et qu’une certaine forme d’éducation est autorisée, y compris pour les programmes d’études supérieures et de troisième cycle. Par ailleurs, force est de constater que le nouveau gouvernement taliban, a jusqu’à présent exclu les femmes du gouvernement et de la plupart des emplois publics.
Un autre phénomène préoccupant intervient. En dépit de la très notable amélioration des possibilités d’éducation pour les femmes enregistrée avant le retour des talibans – l’UNESCO soulignant qu’en 2018, quatre élèves sur dix inscrits dans les écoles étaient des filles – la ségrégation entre les sexes à l’école entre 1991 et 2001, a provoqué une grave pénurie d’enseignants et menacé les possibilités d’enseignement supérieur pour les filles.
D’où le réflexe de nombreux parents qui préfèrent aujourd’hui garder leurs filles à la maison, alors que des talibans armés sillonnent les rues.
D’autres ne voient plus l’intérêt d’éduquer leurs filles, les possibilités d’emploi pour les femmes s’avérant extrêmement rares.
Comme le rapporte un journaliste qui a rencontré quelques-unes de ces jeunes filles en Afghanistan : « Lorsque Narges et ses jeunes sœurs ont finalement été autorisées à retourner à l’école le mois dernier, elles se sont préparées et ont suivi l’exemple de leur mère, en portant chacune une robe noire, une abaya noire, un foulard et un niqab, ainsi qu’un masque sanitaire. »
Des groupes internationaux de défense des droits humains ont critiqué le nouveau gouvernement pour ne pas encore avoir rouvert toutes les écoles aux filles, alors que leurs camarades de classe masculins sont revenus le mois dernier. Ils ont accusé les talibans d’avoir utilisé des menaces et des intimidations pour maintenir très bas les taux de fréquentation de toutes les écoles de filles.
Constatant que les politiques actuellement menées par les talibans sont discriminatoires, injustes et violent le droit international, Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International, a rappelé début octobre : « Le droit à l’éducation est un droit humain fondamental »
De plus, lorsque le directeur de l’éducation des talibans pour la province de Balkh, Abdul Jalil Shahidkhel, assis dans son bureau dans le centre-ville de Mazar-i-Sharif déclare que le nouveau gouvernement prévoit de rouvrir prochainement les collèges et lycées pour filles dans d’autres provinces, la question qu’il pose interpelle : « Pourquoi l’Occident est-il si préoccupé par les femmes ? »
Les craintes exprimées concernant le sort des filles et femmes afghanes se trouvent également accentuées quand ce dernier affirme : « Si le monde insiste pour que les femmes afghanes soient les mêmes que les femmes occidentales, alors ce n’est qu’un rêve ! Nous savons, l’Islam sait et nos femmes savent quoi faire.”
Pourtant, en consultant les résultats d’examens d’études récents, le directeur de l’institut, Haqiq Hutak est catégorique : » Les filles sont plus désireuses d’apprendre que les garçons. Elles prennent plus au sérieux leurs études. »
Il en veut pour preuve le fait que quatre des cinq meilleurs scores sont détenus par des filles.
Face au risque de perdre les talents et compétences de gent féminine, les talibans seraient bien inspirés de se montrer moins rigoristes.
C’est l’avenir de l’Afghanistan qui se joue !