Cette danseuse de 30 ans était l’une des ballerines vedettes du Ballet Bolchoï, une interprète universellement louée au sommet de son art, dans une compagnie qui a longtemps entretenu des liens étroits avec le Kremlin.
Mais sa vie a changé en l’espace d’une journée lorsqu’elle a appris l’entrée en guerre de son pays contre l’Ukraine, le 24 février dernier et a quitté Moscou dans la nuit.
« De toutes les fibres de mon âme, je suis contre la guerre », a-t-elle écrit. « Je n’ai jamais pensé que j’aurais honte de la Russie… Mais maintenant la ligne est tracée sur l’avant et l’après ».
Ballerine depuis 2011 au Bolchoï où elle était danseuse étoile depuis 2016, son grand-père ukrainien tout comme ses parents qu’elle porte dans son cœur sont toujours en Russie.
Première danseuse russe à franchir ce pas publiquement, elle a été suivie dans sa fuite de l’horreur par de nombreux danseurs étrangers des troupes russes.
« Je n’ai jamais suivi la politique », dit Smirnova, en faisant attention à ses mots. « Mais la politique est devenue impossible à ignorer, c’est pourquoi je me suis prononcée contre la guerre. La guerre est un moyen inacceptable dans notre monde civilisé pour résoudre un conflit, quel qu’il soit. » En plus de vouloir que la guerre cesse au plus vite, elle s’inquiète des relations futures entre la Russie et le reste du monde. « C’est vraiment douloureux », dit-elle. « Parce qu’il s’agit aussi de la réputation de l’ensemble du peuple russe. La réputation de la Russie a été gravement endommagée par les actions du gouvernement russe. »
S’exprimant sur Telegram depuis Amsterdam, où elle a rejoint le Dutch National Ballet (DNB), elle explique la raison de son départ : « Je ne me sentais pas en sécurité. »
Bien qu’il n’y ait pas eu de menace directe de la part des autorités, elle ajoute : « J’ai juste senti que l’atmosphère était tendue dans le pays. Des vols internationaux étaient annulés et des rumeurs circulaient sur la fermeture des frontières, alors nous avons décidé de partir. Nous ne voulions pas prendre de risques et attendre plus longtemps. » Elle et son mari se sont d’abord envolés pour Dubaï, puis pour Amsterdam où Smirnova a commencé les répétitions le lendemain.
Depuis qu’elle a quitté la Russie, Olga Smirnova n’a reçu que peu de nouvelles de ses collègues du Bolchoï restés au pays, à part quelques messages « de soutien touchants ».
« Les gens ont peur de s’exprimer. S’ils n’ont pas d’autre choix que de rester, ils préfèrent ne pas s’exprimer. Chacun devrait pouvoir décider du type de société dans lequel il veut vivre et du degré de liberté dont il a besoin pour vivre. »
Olga Smirnova qui se remettait tout juste d’une blessure et n’était donc pas prise par le programme quotidien chargé des répétitions et des représentations du Bolchoï, incarne et fait partager ce qu’il y a de plus beau dans l’art de la danse sur fond de paix.
Alors qu’elle répète déjà pour une nouvelle production de Raymonda, qui débute en avril, elle prévoit de rester à Amsterdam en cette tragique période, n’ayant aucune idée de ce que l’avenir lui réserve tout comme au pays qui est le sien.