En raison du climat de violence qui règne un peu partout dans le monde, Women eLife ne peut s’arrêter aux seuls récents graves évènements qui ont dernièrement donné de la France une image fort déplaisante dont la presse étrangère n’a pas manqué de se faire l’écho.

Toutefois, plutôt que d’épiloguer sur le triste sort d’un jeune voyou tué par un policier et les émeutes et multiples dégradations de biens publics et privés condamnables qui s’en sont suivis et valent à notre pays une bien mauvaise publicité, c’est sur un tout autre dramatique évènement que Women eLife choisit de s’arrêter aujourd’hui.

Il s’agit en l’occurence du particulièrement violent passage à tabac dont a fait l’objet Elena Milachina, une journaliste d’investigation russe travaillant pour le journal indépendant Novaïa Gazeta,

Pour illustrer cette chronique Women e Life ne pouvait, à l’instar de nombreux médias, échapper à la double photo de cette journaliste la montrant avant et après l’épouvantable agression le corps meurtri de bleus et le visage tuméfié recouvert d’un liquide vert, sur son lit d’hôpital.

Au delà du tragique, un magazine féminin indépendant ouvert sur le monde qui regarde les réalités en face et donne de la voix, préfère mettre avant tout l’accent sur les indéniables qualités d’Elena Milachina.

Car son passage à tabac a eu lieu alors qu’elle se rendait en taxi avec son avocat vers la capitale tchétchène Grozny.

Elena Milachina comptait en effet couvrir l’énoncé du verdict dans le procès de Zarema Moussaïeva, épouse d’un ancien juge fédéral russe d’origine tchétchène Saïdi Iangoulbaïev devenu opposant à Ramzan Kadyrov.

Cette journaliste qui a couvert pendant des années la Tchétchénie, la région du Caucase où la Russie a mené deux guerres, et est maintenant étroitement contrôlée par Kadyrov, un proche allié du président russe Vladimir Poutine, sait ce que investigation veut dire et en quoi des pratiques répréhensibles doivent être dénoncées et portées à la connaissance d’un large public.

Pour travailler sur les trafics de drogues, attaques terroristes, catastrophes militaires, et enquêter sur les violations des droits humains, notamment la torture et le meurtre d’homosexuels, la persécution des dissidents et le meurtre d’autres journalistes, elle sait prendre des risques.

Lorsque ses agresseurs ont menacé de la tuer en braquant un pistolet sur sa tête après l’avoir rouée de coups provoquant de multiples fractures, lui avoir rasé les cheveux, cassé les doigts… il n’ont su lui crier que ces mots : «On vous a avertis. Partez d’ici et n’écrivez rien»

Women eLife tient à souligner que Novaïa Gazeta est l’un des rares bastions de la presse libre en Russie dont le rédacteur en chef, Dmitri Mouratov, a reçu le prix Nobel de la Paix en 2021.

L’engagement du journal, notamment dans la couverture des violations des droits humains en Tchétchénie, a coûté la vie à plusieurs de ses collaborateurs, morts assassinés, Anna Politkovskaïa étant la plus célèbre.

L’engagement de Elena Milachina en qualité de journaliste d’investigation est aussi réel qu’indispensable.

Son parcours professionnel et les récompenses qu’elle s’est vue décerner illustrent la qualité de son travail.

En octobre 2009, elle se voyait remettre le prix Alison Des Forges de Human Rights Watch, pour son activisme extraordinaire.

En 2013, le département d’État des États-Unis, lui remettait le prix international de la femme de courage.

En 2017, les ambassadeurs français et allemand en Russie lui décernaient le prix franco-allemand des droits de l’Homme et de l’État de droit.

En 2021, Elena Milachina avait renvoyé la médaille du prix à l’ambassade de France à Moscou, où on la lui avait décerné, comme geste de protestation contre l’expulsion d’un réfugié tchétchène en Russie.

Face à l’épreuve qu’elle vient de subir pour une nouvelle fois dire la vérité, Women eLife tient à exprimer cette journaliste sa profonde reconnaissance et son plein soutien.
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